Archive dans août 2011

Les procédures pénales des mineurs ne peuvent être instruites et jugées par le même magistrat

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 4 mai 2011 par la Cour de cassation d’une question prioritaire de constitutionnalité relative aux articles L. 251-3 et L. 251-4 du code de l’organisation judiciaire (COJ).

Ces deux articles du COJ portent sur la composition du tribunal pour enfants (TPE). D’une part, ils prévoient que ce tribunal est composé d’un juge des enfants, président, et d’assesseurs non professionnels. D’autre part, ils ne sont accompagnés d’aucune disposition faisant obstacle à ce que le juge des enfants qui a instruit l’affaire préside le tribunal.

Par une décision n° 2011-147 du 8 juillet 2011 (voir : http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/l…), le Conseil constitutionnel a jugé :

– en premier lieu, que dans la mesure où le TPE est une juridiction pénale spécialisée, aucune règle constitutionnelle ne s’oppose à ce qu’il soit majoritairement composé d’assesseurs non professionnels. Dès lors l’article L. 251-4 du COJ est conforme à la Constitution.

– par contre, en second lieu, que le juge des enfants qui a instruit la procédure et qui a renvoyé le mineur devant le TPE ne peut par la suite présider la juridiction de jugement habilitée à prononcer les peines. Cela constitue une atteinte au principe d’impartialité des juridictions garanti par la Constitution.

Toutefois, une fois de plus, le Conseil constitutionnel a laissé un délai au législateur français (jusqu’au 1er janvier 2013) pour mettre fin à cette inconstitutionnalité.

Une fois de plus, le Conseil constitutionnel reconnaît qu’un droit fondamental du justiciable, de surcroît mineur, se trouve bafoué mais laisse cette violation perdurer plusieurs mois au nom des conséquences excessives qu’impliqueraient l’abrogation immédiate du texte de loi inconstitutionnel.

On a vu les résultats d’une telle jurisprudence en matière de garde à vue : le Conseil constitutionnel avait laissé un an au législateur pour réagir mais la Cour de cassation, forte de la jurisprudence de la CEDH en la matière, ne lui en a pas laissé le temps si bien que le législateur s’est trouvé contraint de légiférer en catastrophe, votant une loi ô combien bâclée.

En l’espèce la même mésaventure risque bien de se reproduire puisque cela fait plus d’un an que la CEDH a déclaré contraire à l’article 6-1 de la Convention européenne des droits de l’homme un tel cumul de fonctions (voir : CEDH, 2 mars 2010, Adamkiewicz c. Pologne, n° 54729/00).

Comme le disait Arsitote : « Errare humanum est, perseverare diabolicum » (l’erreur est humaine mais persévérer est diabolique).