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Téléréalité et contrat de travail

Chronique mars 2010

Radio Judaica 102,9 FM Strasbourg

Entretien entre Mme VIAL, journaliste, et Me BUFFLER, avocat

Mme VIAL : Me BUFFLER, il y a peu la plus haute juridiction française a jugé que le fait de participer à une émission de télé-réalité comme « L’île de la tentation » s’assimile à un travail. Comment le fait de se dorer la pilule pendant 2 semaines et se faire draguer par de jeunes bellâtres sur des plages paradisiaques peut être assimilé à un travail ?

Me BUFFLER : en fait pour répondre à votre question il faut en revenir à la définition du contrat de travail.

La cour de cassation estime que pour qu’il y ait contrat de travail, il faut que 3 conditions soient réunies : un lien de subordination entre l’employeur présumé et le salarié, une prestation de travail et une rémunération. Si ces 3 conditions sont remplies il y contrat de travail avec une rémunération obligatoire à la clé, minimum le SMIC.

De ces 3 conditions, la condition la plus importante est l’existence d’un lien de subordination, c’est-à-dire que pour qu’il y ait salariat encore faut-il que le salarié soit soumis au pouvoir de direction de l’employeur qui lui donne des directives (horaires, tâches à accomplir, etc).

Dans le cas de « L’île de la tentation », les 3 conditions posaient problème.

Mme VIAL : en effet, en premier lieu, en quoi les candidats de « L’île de la tentation » effectuaient-ils une prestation de travail ?

Me BUFFLER : la réponse à cette question n’est pas évidente puisque selon les conseils des prud’hommes saisis par les ex-candidats la réponse a été différente.

Certains conseils des prud’hommes n’ont vu dans « L’île de la tentation » que de jeunes écervelés à qui TF1 payait 2 semaines de vacances pour aller s’exhiber sur des plages paradisiaques.

Par contre, pour d’autres CPH, les candidats avaient un vrai rôle de composition devant les caméras, les assimilant à des acteurs qui, comme tout travailleur, ont droit à une rémunération.

Mais le point le plus important était l’existence ou non d’un lien de subordination. Les candidats étaient-ils totalement libres de leurs mouvements ou étaient-ils soumis à des contraintes telles que cela puisse s’analyser à un lien de subordination.

Mme VIAL : et donc ?

Me BUFFLER : eh bien la cour de cassation s’est référée au règlement imposé aux participants lequel obligeait les candidats à prendre part aux différentes activités et réunions, à suivre les règles du programme définies par le producteur, à répéter certaines scènes, à respecter les heures de réveil et de sommeil , etc, toute infraction étant sanctionnée par le renvoi.

Au vu de l’ensemble de ces contraintes, la cour de cassation a estimé qu’il y avait bien lien de subordination.

Le règlement des participants a dès lors été requalifié en contrat de travail à durée déterminée avec versements de l’ensemble des salaires impayés à la clé, pour des sommes relativement importantes puisque les candidats salariés travaillaient nuits et jours.

Très honnêtement au vu des règles régissant le contrat de travail, on peut difficilement donner tort à la cour de cassation.

Mme VIAL : merci Me BUFFLER et à la semaine prochaine pour un nouvel éclairage sur l’actualité juridique.

L’appel (en matière pénale)

Chronique mars 2010

Radio Judaica 102,9 FM Strasbourg

Entretien entre Mme VIAL, journaliste, et Me BUFFLER, avocat

Mme VIAL : Me BUFFLER, à l’occasion du procès Clearstream, Nicolas SARKOZY a indiqué qu’il ne ferait pas appel de la décision de relaxe de D. de Villepin. Aussitôt, certains commentateurs se sont gaussés de cette déclaration en indiquant que de toute façon juridiquement Nicolas SARKOZY n’avait pas la possibilité de faire appel de cette relaxe. Est-ce vrai ?

Me BUFFLER : oui, c’est vrai. Pour comprendre il faut entrer dans les subtilités de la procédure pénale.

Lorsqu’une infraction est constatée par le Ministère Public ou rapportée par une victime, des poursuites sont engagées. Ces poursuites pénales sont appelées « action publique ». A l’issue de l’enquête ou de l’instruction, si les organes de poursuites estiment qu’il y a suffisamment d’éléments, la personne suspectée est renvoyée devant le tribunal ou la cour d’assises pour s’expliquer et être éventuellement condamnée.

La victime, que l’on appelle « partie civile », a la possibilité de suivre, voire de participer, à l’enquête et/ou l’instruction.

Devant le tribunal ou la cour d’assises, le Procureur de le République représente la société. Son rôle est de faire sanctionner par les juges tous les actes contraires à la bonne marche de la société. C’est lui qui propose la sanction, à charge pour les juges de le suivre ou non.

La partie civile, elle, par le biais de son avocat, va faire valoir devant le tribunal ou la cour d’assises son préjudice personnel (préjudice matériel, physique, psychologique, etc). La victime ne propose pas de peine ; elle chiffre son préjudice et demande aux juges de condamner la personne poursuivie à lui verser de l’argent en indemnisation de son préjudice.

Mme VIAL : et donc, si la décision rendue par le tribunal ou la cour d’assise ne satisfait pas l’une des parties, qui peut faire appel ?

Me BUFFLER : pour ce qui est de la personne mise en cause (prévenu ou accusé selon les juridictions), celle-ci a toujours la possibilité de faire appel tant sur l’action publique (la peine prononcée) que sur l’action civile (l’argent à verser à la victime).

Par contre, pour ce qui du Procureur de la République, celui-ci ne peut que faire appel de l’action publique s’il estime que la peine prononcée est trop légère. Pour ce qui est de la victime, celle-ci ne peut faire appel que de l’action civile.

Ainsi, dans le cas du procès Clearstream, Nicolas SARKOZY n’avait juridiquement absolument pas la possibilité de faire appel de la relaxe prononcée laquelle correspond à l’action publique. Il a par contre la possibilité de faire appel de l’action civile. Toutefois, comme il réclamait un euro symbolique de dommages et intérêts, cela n’avait pas grand sens.

Par provocation, j’ajouterais toutefois que dans la mesure où le Procureur de la République est sous la tutelle du Ministre de la Justice qui est elle-même sous la tutelle de Nicolas SARKOZY, ce dernier est bien la seule partie civile en France qui peut également faire appel de l’action publique.

Mme VIAL : merci Me BUFFLER et à la semaine prochaine pour un nouvel éclairage sur l’actualité juridique.

Toni Musulin

Chronique janvier 2010

Radio Judaica 102,9 FM Strasbourg

Entretien entre Mme WEIBEL, journaliste, et Me BUFFLER, avocat

Mme WEIBEL : Me BUFFLER, il y a peu certains médias nous ont indiqué que Toni MUSULIN, convoyeur de fonds mis en cause pour le vol de près de 2 millions d’euros à Lyon, risquait au maximum 3 ans de prison. Est-ce vrai ? Comment cela est-il possible alors même que c’est une des sommes les plus importantes volée en France ?

Me BUFFLER : juridiquement le vol se définit comme la soustraction frauduleuse d’un bien appartenant à autrui.

Ainsi, si un ami vous remet de l’argent à charge pour vous de lui rendre, si vous ne vous exécutez pas et gardez l’argent pour vous, ce n’est pas un vol mais un abus de confiance puisqu’il n’y a pas eu soustraction frauduleuse mais remise volontaire.

Dans les faits, l’abus de confiance, est sanctionné de la même manière que le vol, à savoir que le responsable encourt 3 ans de prison ferme. Ces 3 ans sont un maximum, ce n’est pas la peine qui est automatiquement prononcée. C’est là où l’avocat a son rôle à jouer en expliquant aux juges que 3 ans avec sursis, 6 mois fermes, voire la mise hors de cause, s’imposent.

Dans le cas de Toni MUSULIN, il y a clairement eu soustraction frauduleuse. Les faits pour lesquels il est poursuivi constituent donc bien un vol.

Le vol simple – c’est-à-dire sans violence, sans dégradation, seul – est effectivement puni au maximum de 3 ans de prison ferme. Par contre si Toni MUSULIN avait eu des complices ou commis des dégradations, voire les 2, il aurait encouru une peine de 5 ans, voire 7 ans, de prison ferme.

Le fait qu’il ait volé 2 millions d’euros ou 20 euros n’a absolument aucune influence sur la qualification des faits et les textes applicables.

Ainsi, aussi anormal que cela puisse paraître, 2 gamins de 18 ans qui volent un jeu vidéo dans un supermarché encourent effectivement une peine plus lourde (5 ans puisqu’ils sont 2, voire 7 ans s’ils ont cassé l’antivol) que Toni MUSULIN.

Mme WEIBEL : le fait que Toni MUSULIN a apparemment volé 2 millions d’euros n’a ainsi aucune influence sur la peine ?

Me BUFFLER : si, bien sûr. Entre une personne qui a volé un scooter et une personne qui a volé 2 millions d’euros, surtout si l’argent n’a pas été retrouvé, il est bien évident que dans le 2e cas la peine prononcée se rapprochera au plus près du maximum de 3 ans fermes, alors que dans le 1er cas une peine de prison de quelques mois assortie du sursis sera a priori amplement suffisante.

Mme WEIBEL : par ailleurs, Toni MUSULIN s’est volontairement rendu à la police. Or, il semblerait qu’il doive obligatoirement être libéré dans les 4 mois de son incarcération provisoire si son procès n’a pas lieu d’ici là… Est-ce vrai ?

Me BUFFLER : oui, en effet, en matière de délit, la détention provisoire ne peut excéder 4 mois si la personne mise en cause n’a jamais été condamnée par le passé et si elle encourt un maximum de moins de 5 ans de prison, ce qui semble être le cas de Toni MUSULIN. Ainsi, quand bien même Toni MUSELIN devrait rester muet dans les semaines et mois qui viennent, dans tous les cas il devra être remis en liberté au bout de 4 mois dans l’attente de son procès où il risque, pour ce qui est du vol, au maximum 3 ans fermes.

Mme WEIBEL : merci Me BUFFLER et à la semaine prochaine pour un nouvel éclairage sur l’actualité juridique.

Perquisition et mandat

Chronique janvier 2010

Radio Judaica 102,9 FM Strasbourg

Entretien entre Mme WEIBEL, journaliste, et Me BUFFLER, avocat

Mme WEIBEL : Me BUFFLER, dans toute série télévisée américaine les personnes refusent que les policiers pénètrent dans leur maison pour la fouiller sauf à ce que les services de police soient munis d’un mandat de perquisition. Qu’en est-il en France ? La police ou la gendarmerie doit-elle également justifier d’un tel mandat pour fouiller une maison ou un appartement ?

Me BUFFLER : en fait, en France, ce mandat de perquisition n’existe pas. Suivant la procédure, la police ou la gendarmerie française a 2 possibilités.

En cas d’enquête de flagrance, pour simplifier, dans les quinze jours qui suivent la commission d’un crime ou d’un délit, l’officier de police peut perquisitionner tout lieu utile à son enquête sans avoir à justifier de la moindre autorisation. Il en est de même si les services de police ou de gendarmerie travaillent sur instructions du juge d’instruction qui a leur remis une commission rogatoire

A l’inverse, hors flagrant délit, la perquisition d’un domicile n’est possible qu’avec l’accord écrit de la personne. Toutefois, en cas de terrorisme, stupéfiants, trafic d’armes, et plus généralement toute infraction punie d’au moins 5 ans de prison, cette autorisation n’est pas nécessaire si un juge l’en a dispensé.

Dans tous les cas, c’est-à-dire en cas de flagrance ou d’enquête préliminaire, il faut que la personne chez qui la perquisition a lieu soit présente. Si ce n’est pas possible, la perquisition doit se faire en présence de son représentant ou, au pire, de 2 témoins.

Toute perquisition doit faire au final l’objet d’un procès verbal signé par les personnes présentes. A défaut, la perquisition est nulle.

Mme WEIBEL : qu’en est-il des horaires ? On dit souvent que la police ne peut pas entrer dans un domicile avant 6h. Est-ce vrai ?

Me BUFFLER : oui, c’est exact. Aucune perquisition ne peut pas avoir lieu entre 21h et 6h. Mais attention, ce qui compte est l’heure de début de la perquisition. Par exemple, si une perquisition commence à 20h elle peut durer sans souci jusqu’à 23h.

Par exception des perquisitions de nuit sont possibles. Ainsi en est-il des lieux ouverts au public tels les cafés et lieux de spectacles.

Mme WEIBEL : enfin qu’en est-il de la confidentialité ? Est-ce que l’on peut perquisitionner un cabinet d’avocats ou de médecins et ouvrir leurs dossiers ?

Me BUFFLER : pour les cabinets de médecins, avocats, notaires, huissiers, seul un juge, et non un officier de police, peut procéder à la perquisition. En outre, cette perquisition doit obligatoirement être faite en présence d’un représentant de l’ordre ou de l’organisation professionnelle concernée (un représentant de l’ordre des médecins ou de la chambre des notaires par exemple).

Seuls les documents directement en rapport avec les infractions reprochées au professionnel peuvent être saisis.

Mme WEIBEL : merci Me BUFFLER et à la semaine prochaine pour un nouvelle chromique juridique.

Le rappel à la loi

Chronique janvier 2010

Radio Judaica 102,9 FM Strasbourg

Entretien entre Mme WEIBEL, journaliste, et Me BUFFLER, avocat

Mme WEIBEL : Me BUFFLER, il y a peu les médias nous ont indiqué que Julien DRAY, figure nationale du PS, ne serait pas poursuivi pour des détournements de fonds mais ferait l’objet d’un rappel à la loi. Qu’est ce que ce « rappel à la loi » ?

Me BUFFLER : le rappel à la loi constitue en un simple avertissement. La personne mise en cause est convoquée devant le délégué du procureur, c’est-à-dire devant un officier de police judiciaire ou toute personne qualifiée. Généralement c’est un ancien commissaire de police.

Devant le délégué du procureur, une discussion a lieu avec la personne convoquée. Elle est entendue sur les faits qui lui sont reprochés ; on lui lit les textes des infractions qui ont été commises ; elle est informée des peines prévues.

Le but est de faire comprendre à la personne convoquée la portée de ses actes en l’invitant fermement à ne plus jamais recommencer.

Contrairement à ce que les médias et les amis de Julien DRAY semblent laisser entendre, le rappel à la loi n’est en rien une absolution. La personne convoquée est bien coupable des faits qui lui sont reprochés. Simplement, compte tenu du peu de gravité des faits et des circonstances qui l’entourent, le procureur de la République estime qu’il n’est pas nécessaire de renvoyer la personne devant un tribunal, un simple rappel à l’ordre devant suffire.

Mme WEIBEL : ce rappel à la loi est-il inscrit sur le casier judiciaire de la personne mise en cause ?

Me BUFFLER : non. Le rappel à la loi n’est pas inscrit sur le casier judiciaire. Par contre, il en reste toujours une trace dans le fichier du procureur et des services de police. Ainsi, si la personne qui a fait l’objet d’un rappel à la loi se tient à carreau et ne commet plus d’infraction, elle ne sera plus inquiétée. Par contre, si elle fait de nouveau défavorablement parler d’elle, le procureur de la République ressortira l’ancienne affaire et sera plus sévère puisque le rappel à l’ordre effectué précédemment a manifestement été sans effet.

Si la personne est coupable, le rappel à la loi est donc une chance à saisir. C’est clairement une mesure de faveur qui permet d’éviter l’épreuve du jugement et la condamnation qui en découle.

Elle s’adresse essentiellement aux mineurs que se font pincer pour la 1ère fois, mais pas seulement. Le cas de Julien DRAY démontre que le rappel à la loi s’adresse également aux majeurs.

Cette mesure est d’ailleurs efficace puisque moins de 10% des mineurs qui ont fait l’objet d’un rappel à la loi commettent une nouvelle infraction, ce qui démontre à l’évidence que discussion et explication peuvent être aussi efficaces, voire plus, que la répression et la sanction.

Mme WEIBEL : merci Me BUFFLER et à la semaine prochaine pour un nouvel éclairage sur l’actualité juridique.

La garde à vue en France

Chronique décembre 2009

Radio Judaica 102,9 FM Strasbourg

Entretien entre Mme WEIBEL, journaliste, et Me BUFFLER, avocat

Mme WEIBEL : Me BUFFLER, l’actualité récente a une fois de plus été marquée par une polémique relative aux conditions de la garde à vue en France, le nombre des gardes à vue ayant par ailleurs augmenté de plus de 50 % entre 2000 et 2007.

Les conditions de la garde à vue en France sont-elles aussi terribles que les récents témoignages le laissent supposer ?

Me BUFFLER : tout d’abord, il convient de préciser que toute personne suspectée d’avoir commis ou tenté de commettre une infraction peut être gardée à vue par les forces de police ou de gendarmerie. La garde à vue concerne donc tout le monde.

En pratique la personne gardée à vue est placée dans une cellule de la police ou de la gendarmerie quand elle n’est pas entendue sur les faits pour lesquels elle a été placée.

Le souci est que ces cellules sont souvent indigentes : elles sentent l’urine ou pire le vomi, vous disposez d’un simple lit en béton et d’une couverture qui sent mauvais également, et c’est tout.

En principe, la garde à vue dure 24 heures maximum , avec toutefois possibilité d’une prolongation de 24heures supplémentaires, soit 48 heures maximum. Cependant, les dérogations sont nombreuses : en cas de trafic de stupéfiants, vol en bande organisée, terrorisme, etc, la garde à vue peut aller jusqu’à 96h, soit 4 jours.

Ainsi, toute personne suspecte peut du jour au lendemain se retrouver enfermer dans une cellule crasseuse de 48 à 96h avec pour seule distraction quelques mauvais sandwichs et des WC à l’hygiène douteuses.

Et n’attendez pas la moindre indemnisation si au final il s’avère que l’on a rien à vous reprocher.

Cependant, là n’est pas le plus grave. Le souci est que toute personne gardée à vue doit remettre aux forces de l’ordre ses lacets, ceinture, voire soutien-gorges pour les femmes, afin d’éviter les risques de pendaison.

Vous imaginez les conditions d’une audition avec une personne qui doit trainer les pieds pour ne pas chuter et tenir son pantalon pour ne pas le perdre …

Surtout, les forces de l’ordre ont la fâcheuse habitude d’abuser de la fouille à corps.

Mme WEIBEL : c’est quoi exactement la « fouille à corps » ?

Me BUFFLER : la fouille à corps, pudiquement appelée « fouille de sécurité », consiste à palper le gardé à vue afin de s’assurer qu’il ne porte pas sur lui des objets présentant un danger pour lui ou pour les tiers. Surtout cette fouille va jusqu’à vérifier que rien n’est caché dans l’anus et/ou le vagin de la personne gardée à vue.

Selon une circulaire de N. SARKOZY de 2003 cette fouille à corps doit être strictement limitée aux cas où la personne gardée à vue est suspectée de dissimuler des objets dangereux pour elle-même ou les tiers (tel que lame de rasoirs). En aucun cas elle ne doit être systématique.

Problème : quand on sait qu’une telle fouille a été pratiquée sur un journaliste qui était simplement poursuivi pour diffamation ou sur une avocate qui était suspectée d’une violation du secret de l’instruction, on prend conscience du fossé qui existe entre ce qui est et ce qui devrait être.

De telles pratiques doivent impérativement cesser, et rapidement. Elles sont clairement attentatoires à la dignité des personnes gardées à vue et totalement contraires aux exigences de nécessité et de proportionnalité.

Mme WEIBEL : merci Me BUFFLER et à la semaine prochaine pour un nouvel éclairage sur l’actualité juridique.

L’affaire Roman Polanski

Chronique novembre 2009

Radio Judaica 102,9 FM Strasbourg

Entretien entre Mme WEIBEL, journaliste, et Me BUFFLER, avocat

Mme WEIBEL : Me BUFFLER, fin septembre l’actualité a été marquée par l’arrestation et

le placement en détention provisoire du cinéaste Roman Polanski en Suisse alors qu’il se

rendait à un festival de cinéma.

Beaucoup de choses ont été dites, souvent à tort et à travers. Un retour en arrière, avec l’éclairage d’un juriste, s’impose.

Premièrement, comment se fait-il qu’une personne peut être poursuivie, arrêtée et

détenue alors même que la victime a retiré sa plainte et ne reproche plus rien a son

agresseur ?

Me BUFFLER : En préambule, j’aimerais préciser que je ne maîtrise que le droit français.

Or, dans l’affaire Polanski, ce sont les droits américain et international qui sont en jeu.

Toutefois, les grands principes étant généralement les mêmes d’un droit à l’autre, nous

pouvons tenter de raisonner à partir du droit français.

Ainsi, en ce qui concerne les poursuites, il faut savoir que les organes de poursuites,

police ou procureur selon les pays, ne sont jamais liés par les plaintes déposées par les

victimes.

Ainsi, en France, si vous déposez plainte, c’est le Procureur qui va décider, au vu des

éléments dont il dispose, s’il y a lieu d’ouvrir une enquête ou pas.

S’il estime qu’il n’y a pas matière à enquête, il classe sans suite. A l’inverse, s’il estime

qu’il y a lieu a enquête, il renvoie le dossier aux policiers ou à un juge d’instruction selon la difficulté pour enquête.

Par la suite, si la victime retire sa plainte, cela est totalement indifférent. Une fois que la

machine judiciaire est lancée, c’est au procureur (et au juge d’instruction) de décider s’il

l’arrête ou la laisse tourner. La victime n’a quasiment aucun pouvoir.

Un procureur n’a d’ailleurs pas à attendre qu’une victime se manifeste pour enquêter. Il peut s’autosaisir dès qu’il a vent de la moindre infraction. Une simple dénonciation anonyme peut suffire.

Ainsi, dans le cas de Roman Polanski, il semble que le droit américain fonctionne comme

le droit français : le retrait de sa plainte par la victime ne met pas pour autant fin aux

poursuites.

Cela dit, 32 ans après les faits et sans plainte de la victime, il apparaît pour le moins

ridicule de poursuivre une procédure qui aurait due connaître son épilogue au moins 2

décennies plus tôt. Après l’heure ce n’est plus l’heure.

Mme WEIBEL : justement, à ce propos, n’y a-t-il pas une prescription des poursuites ?

Peut-t- on indéfiniment poursuivre des personnes, même 32 ans après les faits ?

Me BUFFLER : en droit français, les seules infractions qui sont imprescriptibles sont les

crimes contre l’humanité. C’est d’ailleurs sur le fondement de cette règle, au titre d’une

complicité de crime contre l’humanité, que Maurice Papon a pu être poursuivi et

condamné près de 60 ans après les faits.

Pour ce qui est des crimes, car le viol qui est reproche à Roman Polanski est bien un

crime, la prescription est de 10 ans.

Ainsi, en théorie, 10 ans après la commission d’un crime, il n’est plus possible de

poursuivre et condamner une personne.

Cela est toutefois très théorique car la prescription est de 10 ans à compter du dernier

acte d’instruction. Ainsi, pour rendre un crime quasiment imprescriptible, il suffit qu’un juge d’instruction fasse un acte (une demande de pièce, d’expertise, complément d’enquête, même le plus anodin) une fois tous les 10 ans pour rejeter à chaque fois la prescription de 10 ans supplémentaires. Sauf erreur, c’est d’ailleurs ce qui a permis d’éviter une

prescription totale des faits dans le cas d’Emile Louis au titre des disparues de l’Yonne au début des années 1980.

Sur ce point, le droit américain, et peut-être suisse, semble différent. En effet, il semble

que tous les crimes soient imprescriptibles. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la série

télévisée « Cold Case », dans laquelle on rouvre des enquêtes non résolues vieilles

parfois de plus de 50 ans, a un sens au Etats-unis et apparaît totalement aberrante en

France.

En tout cas, dans le cas de Roman Polanski, il semble bien que c’est cette

imprescriptibilité de son crime, propre au droit américain, qui permet de venir l’inquiéter 32 ans après les faits.

Mme WEIBEL : merci Me BUFFLER et à la semaine prochaine pour un nouvel éclairage

L’affaire Bamberski

Chronique novembre 2009

Radio Judaica 102,9 FM Strasbourg

Entretien entre Mme WEIBEL, journaliste, et Me BUFFLER, avocat

Mme WEIBEL : Me BUFFLER, fin octobre l’actualité a été marquée par l’enlèvement et la séquestration d’un Dr allemand, livré ligoté aux policiers près du tribunal de Mulhouse. Ce médecin aurait été enlevé par des hommes à la solde d’un père désespéré dont la fille est morte en 1982 et dont ce médecin était le beau père. En 1995 les juridictions françaises ont condamné ce médecin à 15 ans de prison fermes pour le meurtre de sa belle-fille.

Pour le non juriste, diverses questions se posent. La première : comment se fait-il qu’en plus de 10 ans il n’a jamais été extradé d’Allemagne vers la France ? Nous sommes pourtant dans l’UE. Comment se fait-il que des meurtriers, condamnés, puissent encore s’abriter derrière des frontières qui sont censées avoir disparues ?

Me BUFFLER : en fait cette absence d’extradition du médecin allemand par les autorités allemandes est tout a fait normal.

En effet, il est d’usage en droit international que jamais un pays n’extrade ses propres ressortissants vers un pays étranger. Ainsi, la France ou l’Allemagne n’extrade jamais un Français ou un Allemand vers un pays étranger, quel qu’il soit, même si c’est un pays voisin et a priori civilisé.

En fait, ce qui est choquant dans l’affaire de la petite Kalinka Bamberski, c’est que les autorités allemandes ont apparemment très rapidement classé le dossier alors même qu’il semble, au vu des éléments dont la presse s’est faite l’écho, qu’il y avait pour le moins des éléments troublants laissant supposer que la mort était tout sauf naturelle.

Car bien évidemment, l’absence d’extradition d’un ressortissant par son pays, ne signifie pas l’impunité de ce ressortissant. Ainsi, si un Italien a commis un délit, et a fortiori un crime, la victime a parfaitement la possibilité de porter plainte devant les juridictions italiennes afin qu’il soit poursuivi, et condamné.

Une fois de plus, ce qui est choquant dans cette affaire, ce n’est pas cette absence d’extradition, parfaitement normale, mais le fait que les autorités allemandes aient semblet-il trop rapidement refermé le dossier.

Ce n’est finalement que suite a l’apparente négligence des autorités allemandes que le père de la victime s’est retourné vers les autorités françaises, espérant que celles-ci seraient plus disposées a l’écouter, ce qui a été effectivement le cas. La solution française s’est toutefois avérée plus compliquée que prévue.

Mme WEIBEL : en effet, en 1995 la cour d’assises de Paris a condamné le Dr Krombach à 15 années de prison, par contumace. Que signgifie ce terme de « contumace » ?

Me BUFFLER : en fait, lorsque vous avez commis une infraction vous étés généralement convoqué devant le Tribunal pour vous expliquer.

Lorsque vous étés convoqué, vous avez le choix :

– soit vous vous présenté et alors le jugement est régulier (on dit contradictoire),

– soit vous ne vous présenté pas et alors, si la convocation ne vous a pas été remise en main propre, le jugement est rendu par défaut.

Quand il s’agit d’un délit jugé devant le tribunal correctionnel, on dit une décision rendue par défaut. Quand il s’agit d’un crime jugé devant la cour d’assises, on parle d’une décision rendue par contumace. Depuis 2004 on ne parle d’ailleurs plus de contumace mais de simple défaut en matière criminelle.

Dans tous les cas, quand une décision est rendue par défaut ou contumace, la personne condamnée qui a connaissance de la décision a automatiquement le droit d’être rejugée, sans que cela ne porte atteinte à ses droits d’aller en appel puis en cassation. En gros, on reprend le procès depuis le début comme si la décision antérieure n’avait jamais existée.

Mme WEIBEL : enfin, le père de la victime affirme que si rien n’avait été tenté pour ramener le Dr Krombach en France, en 2015 la peine de 15 ans prononcée en 1995 aurait été définitivement prescrite. Le meurtrier n’aurait ainsi plus rien eu à craindre de la justice française. Est -ce vrai ?

Me BUFFLER : eh bien oui. La prescription de la peine, c’est-a-dire l’extinction définitive de la peine prononcée en raison de sa non-exécution, est de 20 ans en matière criminelle. Elle est de 5 ans en matière de délit, et de 3 ans pour les contraventions.

Ainsi, si la police n’arrive pas à mettre la main sur la personne condamnée dans les 20 ans, 5 ans ou 3 ans du prononcé de la peine, la personne condamnée peut tranquillement sortir du bois et n’a plus rien a craindre.

La loi est dure mais c’est la loi.

Mme WEIBEL : merci Me BUFFLER et à la semaine prochaine pour un nouvel éclairage sur l’actualité juridique.

La suppression du juge d’instruction

Chronique novembre 2009

Radio Judaica 102,9 FM Strasbourg

Entretien entre Mme WEIBEL, journaliste, et Me BUFFLER, avocat

Mme WEIBEL : Me BUFFLER, depuis plusieurs semaines l’actualité est marquée par le

rapport LEGER qui propose, entre autres, la suppression du juge d’instruction.

Quelle est la fonction d’un juge d’instruction ?

Me BUFFLER : le juge d’instruction est un juge un peu spécial. En effet, il ne juge pas

vraiment. En fait, il passe le plus clair de son temps dans son bureau à auditionner

témoins, suspects ou victimes et à diriger les services de police et de gendarmerie dans le cadre des enquêtes, le plus souvent criminelles, dont il a la charge.

Un exemple : M DUPONT est accusé d’avoir abusé d’enfants mineurs. Le procureur est

convaincu de sa culpabilité au vu de l’audition des victimes qui l’accusent. Cependant, M.

Dupont clame son innocence et prend un avocat.

Entre l’avocat de la défense et le procureur, le juge d’instruction va tenter de connaître la

vérité, ordonnant expertise, analyse psychologique ou reconstitution, entendant les

témoins, etc.

A l’issue de son enquête, il devra dire s’il estime que M Dupont est coupable et doit dès

lors répondre de ses crimes devant une cour d’assises ou, s’il est innocent, rendre une

ordonnance de non lieu qui l’absout. Le juge d’instruction ne juge ainsi qu’à la marge. Il

donne son sentiment, à charge pour le tribunal de le suivre ou pas.

Mme WEIBEL : nombre de magistrats, les juges d’instruction en premier lieu, ainsi que

d’avocats, sont vent debout contre cette suppression du juge d’instruction. Pourtant, au vu

des manquements du juge d’instruction, notamment dans le procès d’Outreau, cette

suppression ne semble a priori pas dénuée de fondement …

Me BUFFLER : tout d’abord, pour ce qui est d’Outreau, ce n’est pas le « trop » de juge

d’instruction qui a causé le fiasco judiciaire que l’on a connu mais plutôt le « pas assez »

de juge d’instruction, un jeune juge d’instruction s’étant manifestement retrouvé trop seul

face à un dossier qui atteignait une démesure tant au niveau médiatique qu’au niveau des

faits reprochés et des personnes impliquées.

D’ailleurs, suite au procès d’Outreau, la commission qui avait été réunie pour réfléchir au

procès, à ses manquements et aux réformes à entreprendre avait justement proposé de

mettre fin aux juges d’instruction esseulés en créant des pôles d’instruction où les juges

d’instruction seraient au minimum 2.

Cette réforme qui date de 2007 n’a même pas eu le temps d’entrée en vigueur que l’on

pense déjà à une nouvelle réforme qui propose exactement le contraire. On marche sur la

tête !

Surtout, en supprimant le juge d’instruction, on propose de transférer au procureur et aux

services de police, l’ensemble des pouvoirs d’enquête. Or, dans le fiasco d’Outreau, le

procureur ou les services de Police n’ont pas été plus vertueux que le juge d’instruction. Ils

l’ont même incité à poursuivre dans une voie sans issue.

Ainsi, s’il est certain que le juge d’instruction n’est pas sans défauts, il est tout aussi

certain que le salut ne viendra pas du procureur ou de la police.

Mme WEIBEL : mais pour en revenir à la suppression du juge d’instruction, celui-ci

n’existe plus en Italie et n’a jamais existé en GB ou aux Etats-Unis. Pour autant, leurs

systèmes judiciaires n’ont pas l’air de fonctionner plus mal que le notre. Où est le

problème ?

Me BUFFLER : en fait, le souci de la réforme proposée en France est que, contrairement

à l’Italie ou aux pays anglo-saxon où les organes de poursuite sont totalement

indépendants du pouvoir, en France on ne propose pas de mettre fin au rapport

hiérarchique qui existe entre les procureurs et le ministre de la Justice. Or, quand on voit à

quel point certains procureurs ont le petit doigt sur la couture du pantalon de leur ministre

de tutelle et à quel point leur avancement dépend de leur plus ou moins grande servilité,

on peut nourrir les craintes les plus sérieuses.

On voit mal en effet des affaires politico-judiciaires sortir si les procureurs sont aux ordres

de leur ministre. A l’heure actuelle, si de telles affaires ont pu émerger, c’est bien grâce à

des juges d’instruction obstinés et indépendants qui sont allés contre les avis de procureurs serviles qui estimaient qu’il n’y avait rien a creuser.

De même, si les procureurs restent aux ordres de leur ministre on peut craindre que ceux-ci

entament des procédures uniquement pour nuire au camp politique d’en face qui n’a

pas la chance d’être au pouvoir, de diriger et d’instrumentaliser la machine judiciaire.

On peut nourrir les mêmes craintes en ce qui concerne les infractions en matière de droit

des affaires (délits d’initié, abus de biens sociaux et autres détournements). En effet,

quand on voit la proximité de certains grands chefs d’entreprise avec nos politiques, on

peut raisonnablement craindre une volonté d’étouffer certaines affaires.

Cela dit, pour le justiciable lambda, cette réforme ne va pas changer grand chose. En

effet, quand on voit dans certaines procédures le juge d’instruction se contenter de faire

un « copier-coller » des réquisitions du procureur ; quand on voit dans certaines

procédures le juge d’instruction se limiter à instruire a charge ; on peut raisonnablement

souhaiter la suppression du juge d’instruction. Cela mettra fin à une hypocrisie sans nom.

Toutefois, c’est comme pour la nomination du président de FRANCE TELEVISION.

Précédemment sa nomination était sujette a caution, l’indépendance du CSA quant au

choix de l’élu étant toute relative. Cependant, plutôt que de tenter d’améliorer le système

afin d’assurer une réelle indépendance, on prétexte une hypocrisie, réelle, pour jeter le

bébé avec l’eau du bain et instaurer l’arbitraire le plus complet. Avec la suppression du

juge d’instruction on est exactement dans cette logique : le juge d’instruction n’est pas

sans défaut et plutôt que de tenter d’améliorer les choses, on le supprime pour le

remplacer par un système pire que le précédent.

Mme WEIBEL : merci Me BUFFLER et à la semaine prochaine pour un nouvel éclairage

sur l’actualité juridique.

Les locations saisonnières

Chronique juillet 2009

Radio Judaica 102,9 FM Strasbourg

Entretien entre Mme WEIBEL, journaliste, et Me BUFFLER, avocat

Mme WEIBEL : Me BUFFLER, pour ce nouveau n° de notre chronique juridique, vous avez décidé de nous parler des locations saisonnières, sujet ô combien d’actualité.

Me BUFFLER : oui, les locations saisonnières représentent environ 20% des

hébergements en période estivale, hors hébergement non marchand. Or, le souci,

est que le plus souvent on loue son appartement ou sa villa de vacances par

correspondance, sur internet, parfois par simple bouche à oreille, sans avoir jamais

vu, encore moins visité, le bien.

Il arrive malheureusement que le bien ne soit pas à la hauteur du descriptif ou alors

que vous soyez contraint d’annuler vos vacances en dernière minute suite à un

imprévu (accident, décès d’un proche, nouvel emploi, etc).

Si l’on a été suffisamment prudent lors de la réservation, ou à l’arrivée sur les lieux, il

est possible de limiter la casse, voire se faire rembourser sa location.

Mme WEIBEL : quelles sont dès lors les précautions dont il faut s’entourer ?

Me BUFFLER : il faut être vigilant à toutes les étapes de la location : lors de la

réservation, au moment de l’entrée dans les lieux, pendant le séjour et enfin à la

sortie.

Au moment de signer le contrat de location, vous devez être en possession du

maximum de renseignements sur le logement, sa situation, son prix, et tout cela par

écrit, car comme le dit le proverbe « les paroles s’envolent, les écrits restent ».

Tout loueur, professionnel ou particulier, doit remettre à son futur locataire un

descriptif des lieux.

Le descriptif doit préciser entre autres le prix et la commission éventuelle de l’agence

immobilière, le nombre et la taille des pièces, le confort existant, les différents

éléments ménagers mis à disposition, la situation de l’immeuble, etc.

C’est ce descriptif qui va engager le loueur en cas de problème. Il ne doit donc pas

être négligé. Si vous avez des questions complémentaires qui n’apparaissent pas sur

le descriptif, n’hésitez pas à le faire compléter par écrit, notamment à quelle distance

se trouve la mer, s’il faut traverser une voie de chemin de fer ou une autoroute, en

cas d’handicap s’il existe un ascenseur, etc.

Le contrat de location peut résulter d’un simple échange de correspondances, voire

dans l’absolu d’un simple échange d’e-mails, à partir du moment où les 2 parties sont

d’accord sur les conditions de la location. Il va sans dire qu’il convient de garder une

copie de ces correspondances en cas d’éventuel souci par la suite.

En cas de contrat en bonne et due forme, ne signez pas sans lire. Certains loueurs

n’hésitent pas à y intégrer des clauses parfaitement abusives, telles le paiement de

la totalité du coût du séjour en cas d’annulation sans que le loueur soit soumis à la

même sanction si l’annulation est de son fait.

Dans tous les cas, c’est-à-dire en cas de contrat ou de simple échange de lettre, il

doit être clairement précisé :

– les dates et la durée de la location,

– son prix et le montant des charges, sachant que certains loueurs font varier le

prix de la location en fonction du nombre d’occupant,

– le montant du dépôt de garantie, improprement appelée caution, qui peut être

encaissé par le bailleur dès réception,

– l’éventuelle commission d’agence ou taxe de séjour perçue par la commune.

Mme WEIBEL : qu’en est-il des paiements d’avance ? Est-ce qu’un loueur peut

exiger le paiement de la totalité du séjour avant même que le locataire ne soit entré

dans les lieux ?

Me BUFFLER : oui et non. En vérité tout dépend si vous avez affaire à un

professionnel ou à un particulier.

Un agent immobilier ne peut jamais exiger plus du quart du prix de la location 6 mois

avant la location. Par contre, il peut demander le règlement de la totalité ou du solde

un mois avant la remise des clés.

Pour les bailleurs non professionnels, il n’y a aucun interdit. Celui-ci peut exiger le

versement de la totalité du prix à tout instant. C’est la raison pour laquelle il est

conseillé de faire préciser les modalités de paiement lors de la réservation en tentant

de se rapprocher le plus possible des règles imposées aux agents immobiliers, c’est-à-

dire pas plus du quart du prix dans un 1er temps, le solde à la remise des clés ou

au pire 1 mois avant la date prévue.

Remarque importante : il convient absolument de faire préciser si ce paiement

d’avance constitue des arrhes ou un acompte. La différence est de taille :

– en effet, pour ce qui des arrhes : en cas d’imprévu (maladie, accident, …) il

vous est possible d’annuler votre location, même la veille, et vous perdez

uniquement votre avance.

– par contre, en cas d’acompte : il ne vous est pas possible d’annuler votre

séjour et en cas d’imprévu vous devrez régler la totalité du coût du séjour,

sauf à ce que le loueur soit parvenu à trouver d’autres locataires.

Pour éviter ce genre de mauvaise surprise, il convient de lire attentivement le contrat

de location et d’en négocier les clauses. Cela est toutefois généralement

parfaitement illusoire, le contrat de location soumis étant à prendre ou à laisser.

Mme WEIBEL : nous avons vu les précautions à prendre lors de la réservation du

bien. Qu’en est-il de l’entrée dans les lieux ?

Me BUFFLER : lors de l’entrée dans les lieux, première chose à faire : dresser un

état des lieux précis par écrit et en présence du loueur. Il convient d’y faire figurer

l’ensemble des équipements mis à disposition ainsi qu’un relevé des compteurs.

Bien évidemment, si des objets manquent, si des équipements sont endommagés, il

convient d’en faire mention.

Si le bien ne correspond pas au descriptif (la mer est à 1km, l’appartement s’est

transformé en placard amélioré, …), refusez de payer le solde, s’il n’est pas trop tard,

et exigez en tout état de cause le remboursement des sommes versées. Dans tous les cas, il est conseillé de ne pas prendre possession du local. Vous pouvez parallèlement déposer plainte, de telles fautes de la part d’un loueur étant punies d’une peine d’amende.

En cas de vices ou de désagréments non signalés et non rédhibitoire (proximité de

l’aéroport, chantier de construction occasionnant du bruit, etc), vous êtes en droit

d’exiger des dommages et intérêts à hauteur de votre préjudice. En pratique, si vous décidez de rester, vous exigerez une diminution du prix. Dans le cas contraire, refusez de payer le solde et exigez le remboursement des sommes versées.

En tout hypothèse, en cas de litige, afin de vous ménager des éléments de preuve il

est conseillé de prendre des photos, de faire attester des témoins (manuscrit daté et

signé + carte identité + formule type), voire de mandater un huissier afin de faire

dresser un constat (300 euros environs). Après il sera trop tard.

Mme WEIBEL : une fois dans les lieux, est-ce que le locataire peut enfin baisser la

garde afin de profiter pleinement de ses vacances ou doit-il toujours avoir ses sens

aux aguets ?

Me BUFFLER : l’état des lieux dressé et le coffre de sa voiture vidé, le locataire doit

user du bien en bon père de famille, ce qui signifie qu’il doit se comporter comme

tout bon père de famille tempéré en ayant soin du logement et du mobilier qui lui ont

été confiés, en évitant de faire un bruit excessif et en évitant d’abuser de la capacité

d’accueil des locaux loués.

En cas de dégradations dans le logement, c’est le locataire qui doit en répondre, sauf

si ces dégradations résultent de l’usure normale du bien ou d’un vice.

A cet égard, le locataire doit s’assurer que le bien loué est bien assuré contre les

risques incendie ou dégâts des eaux car, en cas sinistre, c’est le locataire et non le

propriétaire qui devra en répondre, étant précisé que le contrat d’assurance du

bailleur couvre rarement les dégâts causés par un locataire, il est donc insuffisant.

C’est au locataire de se couvrir.

Mme WEIBEL : comment ?

Me BUFFLER : soit en souscrivant un contrat d’assurance spécifique, soit, et c’est le

plus simple, en contactant son assurance multirisque habitation en sollicitant une

extension de garantie villégiature si celle-ci n’est pas déjà incluse dans le contrat.

Mme WEIBEL : enfin, le séjour tire à sa fin, tout s’est bien passé ; quelles sont les

dernières précautions que doit prendre le preneur avant de quitter son lieu de

vacances ?

Me BUFFLER : en sortant, le locataire doit bien évidement veiller à procéder à l’état

des lieux de sortie, toujours en présence du loueur. Pour cela prévenez-le de votre

heure de départ et convenez d’un rendez-vous sur place.

Cet état des lieux de sortie doit être précis si vous voulez évitez de vous voir

indûment imputées des dégradations.

En cas de désaccord, ne refusez pas de signer l’état des lieux mais indiquez sur le

document les points de désaccords et les raisons.

A votre départ, si le loueur n’a rien à vous reprocher, demandez un solde de tout

compte par lequel le loueur indique que vous ne lui devez plus rien et demandez le

remboursement immédiat du dépôt de garantie.

A l’inverse, s’il reste des sommes à régler, le dépôt de garantie pourra être conservé

(3 mois maximum) dans l’attente du règlement des sommes encore dues. Exigez les

justificatifs des sommes retenues.

Si vous respectez l’ensemble de ces conseils, normalement vous devriez être à l’abri

de la majorité des désagréments que peuvent rencontrer les locataires de locations

saisonnières.

Mme WEIBEL : merci Me BUFFLER et à la semaine prochaine pour une nouvelle chronique.