Les avocates strasbourgeoises rebelles

Les avocates strasbourgeoises rebelles

La profession d’avocat est ainsi faite que tout avocat qui travaille pour le compte d’un cabinet n’est pas (sauf exception) salarié de ce cabinet mais collaborateur libéral. La différence est de taille puisque, si un salarié bénéficie de la protection du code du travail, l’avocat collaborateur est profession libérale et à ce titre est uniquement soumis à sa déontologie et aux règles générales du droit des contrats. Ainsi, si pour licencier un salarié il faut justifier d’un motif réel et sérieux conformément au droit du travail, pour virer un avocat collaborateur il n’y a pas lieu de justifier du moindre motif. Comme tout contrat à durée indéterminée, une partie peut y mettre fin à tout instant, sans raison, sous réserve de respecter un délai de préavis.

A Strasbourg une habitude fort détestable s’est développée : comme les avocates ne bénéficient pas de la protection du droit du travail et qu’un congédiement n’a pas à être motivé, nombre de cabinets strasbourgeois ont pris le pli de virer leurs collaboratrices à leur retour de couches (voire pendant leur grossesse). Une avocate avec un ou plusieurs moutards dans les pattes est forcément moins rentable pour son patron.

Tant que le barreau de Strasbourg était à majorité masculine, cette pratique n’interpelait guère. Toutefois, la féminisation de la profession s’accélérant, les avocates flouées ont décidé de se rebiffer. Ainsi, mi-novembre, pour la première fois, une motion signée par plus de 160 avocat(e)s strasbourgeois a dénoncé « les ruptures des contrats de collaboration des avocates au cours ou à l’issue de leur congé maternité (…). La fréquence de ces ruptures ne relève pas d’une simple coïncidence. Elles sont, en réalité, l’expression d’une discrimination liée à l’état de grossesse et à la maternité. ».

Cette pratique discriminatoire est d’autant plus choquante qu’elle émane de professionnels dont le serment est d’exercer leurs fonctions avec dignité et humanité, nombre d’entre eux étant par ailleurs appelés à défendre au quotidien les victimes de discriminations.

Mais l’ironie ne s’arrête pas là : parmi les signataires de la motion se trouvent des avocats qui, justement, n’ont pas hésité à virer leur(s) collaboratrice(s) au cours ou à l’issue de leur congé maternité. Manifestement certains avocats ne manquent pas d’humour, ni d’air !

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