Archive dans 2014

Procédure orale : quand soulever une exception d’incompétence ?

Les exceptions de procédure doivent être soulevées in limine litis, c’est-à-dire avant toute défense au fond.

L’exception de procédure se distingue de la fin de non-recevoir en ce qu’elle est constitutive d’une irrégularité qui concerne le fond ou la forme des actes de procédure ; elle affecte la validité de la procédure, alors que la fin de non-recevoir est une irrégularité qui touche au droit d’agir et atteint l’action elle-même (articles 32 et 122 du Code de Procédure Civile).

Pour qu’une exception de procédure prospère, l’article 74 du CPC impose qu’elle soit, à peine d’irrecevabilité, soulevée avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir.

Qu’en est-il en matière de procédure orale ? Peut-on encore soulever le jour des plaidoiries une exception d’incompétence alors que des conclusions écrites au fond ont d’ores et déjà été régularisées ?

Lire la suite

Quel est le juge compétent pour le partage des intérêts patrimoniaux des concubins ?

L’article 14 de la loi du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d’allègement des
procédures a modifié l’article L 213-3 du Code de l’Organisation Judiciaire. Désormais, ce n’est donc plus le tribunal d’instance mais le Juge aux affaires
familiales qui est compétent à l’égard des couples de concubins et des couples liés par un PACS.

Plus précisément, l’article 14 de la loi du 12 mai 2009 dispose que le JAF connaît :

-« des indivisions entre personnes liées par un pacte civil de solidarité ou entre concubins, de la
séparation de biens judiciaire, sous réserve des compétences du tribunal de grande instance et du juge des
tutelles des majeurs ».

-« du divorce, de la séparation de corps et de leurs conséquences, de la liquidation et du partage
des intérêts patrimoniaux des époux, des personnes liées par un pacte civil de solidarité et des concubins,
sauf en cas de décès ou de déclaration d’absence ».

A toute fin, les compétences d’attribution des tribunaux relevant de l’ordre public judiciaire, toute violation de cette règle  peut être soulevée d’office par le tribunal d’instance.

Colocation et loi ALUR : ce qui change

Une clause de solidarité inscrite sur un bail de colocation rend l’ensemble des colocataires responsable du paiement du loyer. Le propriétaire peut ainsi se retourner contre un seul colocataire pour assurer la totalité du loyer.

Si la loi ALUR (loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové)  du 24 mars 2014 ne change pas ce point, elle a toutefois introduit une grande nouveauté : la solidarité du colocataire qui a donné son congé et a quitté le logement s’arrête avec l’arrivée du colocataire qui le remplace. Il n’y a plus à attendre six mois.

Autre nouveauté : chaque colocataire devra formellement identifier son garant ou caution. Si ce dernier est aussi soumis à une clause de solidarité, la loi ALUR l’en délivre sous les même conditions que pour le paiement des loyers : dès la nomination formelle d’un nouveau colocataire sur le bail ou six mois maximum après le départ du colocataire en question.

Démission du salarié : le préavis raccourci en droit local

En cas de démission, un salarié travaillant en Alsace Moselle bénéficie toujours du délai le plus favorable. Ainsi, si le droit général (les conventions collectives ou le contrat de travail) impose des délais plus longs, ils ne s’appliquent pas et se trouvent supplantés par le droit local.

Dès lors, en vertu de l’article L 1234-15 du code du travail, en cas de démission le salarié ne doit respecter qu’un préavis :

1° D’un jour lorsque sa rémunération est fixée par jour ;

2° D’une semaine lorsque sa rémunération est fixée par semaine ;

3° De quinze jours lorsque sa rémunération est fixée par mois ;

4° De six semaines lorsque sa rémunération est fixée par trimestre ou par période plus longue.

L’article L 1234-16 du code du travail ajoute :

Ont droit à un préavis de six semaines :

1° Les professeurs et personnes employées chez des particuliers ;

2° Les commis commerciaux mentionnés à l’article L. 1226-24 ;

3° Les salariés dont la rémunération est fixe et qui sont chargés de manière permanente de la direction ou la surveillance d’une activité ou d’une partie de celle-ci, ou ceux à qui sont confiés des services techniques nécessitant une certaine qualification.

Au vu de ces 2 articles, pour la plupart des salariés qui aujourd’hui perçoivent un salaire mensuel, le préavis se limite donc à 15 jours.

Les commis commerciaux, cadres, techniciens et agents de maîtrise, doivent quant à eux respecter un délai de préavis de 6 semaines.

 

La notion de « commis commercial » en droit local

L’expression “commis commercial”  n’a pas d’équivalent en droit général. Il est un pur produit du droit local. Il est la traduction du terme « Handlungsgehilfe » que l’on trouvait dans le code de commerce  d’origine, allemand.

La notion de “commis commercial”, difficile à appréhender et à transposer dans le droit positif, trouvait un début de définition dans l’article 59 du code de commerce local qui évoquait un salarié employé dans une maison de commerce pour fournir des services commerciaux.

Ainsi, lemployeur du commis commercial doit impérativement avoir la qualité de commerçant telle que définie à l’article L 121-1 du code de commerce, c’est-à-dire exercer des actes de commerce et en faire sa profession habituelle. Peu importe qu’il soit commerçant de par son activité ou de par sa forme (SARL, SA, SAS, … ).

La jurisprudence a dégagé quatre critères permettant de cerner la notion de commis commercial :

  1. Le commis commercial est un salarié qui exerce des fonctions commerciales dans l’entreprise et qui est en relation directe ou essentielle avec la clientèle. Les fonctions commerciales dépassent la seule activité de vente pour englober tous les services nécessaires à l’accomplissement de l’activité commerciale de l’entreprise.
  2. Les fonctions exercées par le salarié doivent être à prédominance intellectuelle, à l’exclusion des fonctions manuelles d’exécution ou des fonctions purement techniques.
  3. Une certaine formation est nécessaire à l’exécution des services commerciaux (formation sanctionnée par un diplôme ou acquise par une pratique ou plusieurs années d’expérience).
  4. La fonction du commis commercial ne doit pas comporter une trop grande indépendance dans le travail ou dans l’organisation du travail.  Les cadres de haut niveau en sont donc exclus.

L’analyse doit se faire au cas par cas en s’attachant à la réalité des fonctions exercées par le salarié dans l’entreprise. Les mentions figurant dans le contrat de travail ou sur le bulletin de salaire sont sans emport.

 

Acte de décès du monstre

Le Conseil Constitutionnel a rendu aujourd’hui sa décision relative à l’examen de la loi ALUR et il a censuré notamment son article 156, dénommé auparavant article 70 quater.

Selon le Conseil, cet article, « relatif aux actes constatant la cession de la majorité des parts sociales d’une société civile immobilière, introduit par amendement, ne présentait pas de lien avec les dispositions du projet de loi initial » .

Il s’agissait donc d’un « cavalier législatif » adopté selon une procédure contraire à la Constitution.

L’essentiel est là : l’acte juridique d’expert-comptable est mort, même si l’on peut regretter que le Conseil Constitutionnel ne s’est pas prononcé sur le fond.

L’article 70 quater de la loi ALUR censuré

Le monstre est né !

C’est fait, la loi ALUR a été adoptée avec le néfaste article 70 quater.

Ni le gouvernement, ni les sénateurs (en particulier ceux de la majorité) n’ont voulu prendre le risque de faire échouer l’ensemble de la loi ALUR pour ce seul article 70 quater.

C’est évidemment particulièrement regrettable … et le mot est faible…

Dans l’immédiat, je vous renvoie vers le dernier communiqué de la FNUJA :

http://www.fnuja.com/Article-70-quater-de-la-loi-ALUR-le-combat-continue…

Un nouveau monstre juridique : l’acte juridique d’expert comptable

Le 11 février 2014 a été adopté par la Commission Mixte Paritaire (CMP) du Parlement un article 70 quater du projet de loi ALUR permettant la cession de parts de sociétés civiles immobilières (SCI) par des actes d’avocats, des actes authentiques ou – nouveauté – par des « actes juridiques » d’experts comptables (voir : http://www.fnuja.com/Cessions-de-parts-de-SCI-un-texte-inacceptable-_a18…).

Dans une résolution adoptée le 14 février 2014, le Conseil National des Barreaux (CNB) a rappelé qu’une telle disposition est totalement inacceptable en ce qu’elle crée une confusion entre les professionnels du chiffre (experts comptables) et les professionnels du droit (avocats) et génère un risque d’insécurité juridique fort pour les citoyens.

Nous pouvions espérer que le gouvernement se ressaisisse.

Il n’en est rien puisque le Gouvernement à déposé, devant l’Assemblée Nationale, un certain nombre d’amendements mais aucun sur l’article 70 quater. De deux choses l’une : soit il s’en est désintéressé ; soit il a arbitré en faveur des experts-comptables…

En tout état de cause, l’Assemblée Nationale a donc adopté l’article 70 quater dans la version proposée par la CMP.

Une dernière chance repose sur le vote du Sénat qui va avoir lieu ce jeudi 20 février.

La question est grave car, au-delà de la question de la cession de parts de SCI, il porte en germe la création d’un « acte juridique d’expert comptable » et l’officialisation de l’exercice du droit à titre principal par les professionnels du chiffre.

Accessoirement on peut sérieusement se demander si la moindre logique gouverne nos parlementaires : il y a 4 mois nos députés voulaient réserver la cession de parts sociales de SCI aux seuls notaires et voilà qu’aujourd »hui ils veulent l’ouvrir aux experts comptables qui ne sont pas des juristes. Au royaume du n’importe quoi nos députés sont des champions !

Décompte des heures de formation

L’obligation de formation continue a été imposée aux avocats par l’article 21 de la loi du 11 février 2004 afin d’assurer le perfectionnement des connaissances nécessaires à l’exercice de la profession.

Tous les avocats inscrits aux tableaux des Ordres sont concernés.

La durée de la formation est de 20 heures par année civile ou 40 heures sur deux années consécutives.

Question : un avocat qui a effectué 70 heures en année N, et qui est à jour sur N-1, pourra-t-il reporter 20 heures sur N+1 et autant en N+2, voire N+3 ?

Dans la mesure où l’article 85 du décret du 27 novembre 1991 prévoit que « la durée de la formation continue est de vingt heures au cours d’une année civile ou de quarante heures au cours de deux années consécutives », les heures excédentaires au-delà de N+1 doivent être considérées comme « perdues », du moins telle est l’interprétation de l’Ordre des Avocats de Strasbourg.

Les avocats en droit des étrangers au pilori !

Dans son rapport de septembre 2013, publié fin décembre 2013 (consultable à l’adresse : http://www.interieur.gouv.fr/Publications/Rapports-de-l-IGA/Immigration/…), l’Inspection Générale de l’Adminsitration (IGA) a phosphoré sur l’évolution et la maîtrise des dépenses de contentieux à la charge du Ministère de l’Intérieur.

Dans ce rapport, l’IGA ose notamment reprocher aux avocats de « développer en permanence de nouvelles stratégies juridictionnelles», autrement dit l’IGA trouve anormal que les avocats passent les textes à la moulinette et dénoncent leurs failles !

Il convient manifestement de rappeler au Ministère de l’Intérieur que la fonction de l’avocat est précisément de développer « des stratégies juridictionnelles » dans le seul but de faire respecter le droit et que ne pas le faire relèverait de la faute professionnelle.

Dans ce rapport, l’IGA note également qu’entre 2008 et 2012, les litiges spécifiques aux ressortissants étrangers ont provoqué un doublement des frais pour les préfectures, passant de 8,5 à 16,6 millions d’euros. Surtout, l’IGA s’offusque de la multiplication des condamantions de l’Etat à rembourser les frais d’avocats des ressortissants étrangers lorsque l’État a perdu le litige.

Or, si les préfectures sont condamnées au paiement de sommes au titre de l’article L 761-1 du Code de justice administrative, cela n’est pas le résultat de stratégies malhonnêtes de l’avocat, mais de décisions administratives non fondées sanctionnées par des juges libres, dont la mission est de faire respecter l’État de droit !

Et des perles, ce rapport en compte de nombreuses autres : les magistrats qui ne prendraient pas assez en compte la situation budgétaire de l’Etat, les avocats qui ne penseraient que profits, les étrangers qui ont l’outrecuidance de demander à être indemnisés quand une décision illégale leur a porté préjudice, etc.

A ce degré de réflexion, il aurait mieux valu que l’IGA phospohore sur un autre sujet ou, bêtement, consulte avocats, magistrats et associations, avant de commettre un tel rapport.