Archive dans octobre 2012

L’accessibilité des cabinets d’avocats aux personnes handicapées

Suite au rapport réalisé en 2011 par l’IGAS, le CGEFI et le CGEDD et divulgué mi-septembre par Mme Carlotti, ministre déléguée en charge des personnes handicapées, il n’est peut-être pas inutile de rappeler quelles sont les obligations des cabinets d’avocats en matière d’accessibilité aux personnes handicapées.

Ce sont les articles L. 123-1 à 123-4, R. 123-2 à 123-17, L. 111-7 à 111-8-4 et R. 111-19-7 à 111-19-12 du Code de la construction et de l’habitation (CCH) qui soumettent la construction, la transformation ou l’aménagement de locaux commerciaux ou professionnels à un certain nombre d’obligations et normes de sécurité et d’accessibilité (aux personnes handicapées en particulier).

Aux termes de l’article R. 123-2 sont considérés comme ERP (établissement recevant du public) tous les lieux publics ou privés accueillant des clients ou des utilisateurs autres que les employés (salariés ou fonctionnaires) qui sont eux protégés par les règles relatives à la santé et sécurité au travail.

Leurs taille, destination, usage et risques variant grandement d’un établissement à l’autre, les ERP sont répartis en types, selon la nature de leur exploitation, et classés en cinq catégories selon l’effectif du public et du personnel.

Interrogés en 2009 par les parlementaires quant à l’applicabilité de cette réglementation aux locaux occupés par des professions libérales (avocats, notaires, huissiers, médecins, infirmières…), le ministre de l’écologie, puis la ministre du logement, ont répondu en des termes similaires (Rép. Min. n’41137, JOAN du 14 avril 2009, p. 35G5. 2 ; Rép. Min. n’07256, JO Sénat du il juin 2009, p. 1463) que :

«Les locaux dans lesquels s’exercent des activités libérales ne sont pas considérés comme des établissements recevant du public, lorsque celles-ci s’exercent même partiellement dans le même ensemble de pièces destinées à l’habitation de l’occupant.

Cette disposition résulte du code de la construction et de l’habitation (CCH), article R 111-1.

Dans les autres cas, ils sont considérés comme des établissements de 5e catégorie ».

Ainsi, le local dans lequel exerce un avocat est, en règle générale, soumis à cette réglementation, quelque peu allégée s’agissant d’ERP de 5e catégorie.

En revanche, ledit local ne sera pas considéré comme un ERP si l’activité libérale est exercée par l’occupant, même partiellement, dans le même ensemble de pièces que celui de sa vie familiale. Dans cette hypothèse, ce sont les règles de sécurité-incendie des bâtiments d’habitation qui trouvent à s’appliquer (Arr. 31 janv. 1986, mod.).

S’agissant de cette 5e catégorie d’ERP, la mise en conformité doit se faire avant le 1er janvier 2015 (art. R 111-19-8, III, du CCH).

Cette date butoir s’applique tant aux ERP existants, «qu’à ceux créés par changement de destination pour acceuillir des professions libérales ».

Si la législation devait rester inchangée, cela promet de coûteux travaux de mise aux normes.

Seule exception : sur demande formulée auprès du préfet, des dérogations peuvent être accordées, notamment lorsque les travaux d’accessibilité sont susceptibles d’avoir des conséquences excessives sur l’activité de l’établissement ou du fait de contraintes liées à la conservation du patrimoine architectural (art. R 111-19-10, elt fur renvoi, R. 1 1 1 -1 9-6 du CCH).

L’opposition à tiers détenteur sur les fonds CARPA detenus pour le compte des avocats à l’AJ

L’opposition à tiers détenteur (OTD) est une procédure de recouvrement mise à la disposition des organismes de sécurité sociale pour saisir des fonds appartenant à son débiteur et se trouvant entre les mains d’un tiers qui les détient pour son compte.

Les articles L. 243-3-1 et L.652-3 du code de la sécurité sociale offrent la possibilité aux URSSAF et aux CGSS de recouvrer leur créance quelle que soit la catégorie du cotisant concerné, l’origine de la dette en cause et sans intervention d’un huissier de justice, dès lors que ces organismes sont munis d’un titre exécutoire.

Depuis la loi du 24 décembre 2009, l’article L.652-3 n’exige plus que la créance soit privilégiée pour engager la procédure.

A compter de 2013 la branche recouvrement du régime général de la sécurité sociale entend mettre en oeuvre cette procédure au titre des fonds que détiennent les CARPA pour le compte des avocats dans le cadre du paiement de l’aide juridictionnelle (articles 27, 64-1, 64-2 et 64-3 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 et articles 118 et 132-1 du décret 91-1266 du 19 décembre 1991).

Les avocats alsaciens ont de la chance : l’Alsace est avec l’Aquitaine, la Basse-Normandie, la Bourgogne, l’Ile-de-France et la région PACA une des régions « test ». Des OTD seront dès lors lancées dans ces régions sans attendre la nouvelle année. Ô joie !

La réforme jusqu’à présent écartée : celle des cours d’appel

Le 11 juillet 2012 les Sénateurs BORVO-COHEN SEAT et DETRAIGNE, au nom de la Commission des Lois, ont déposé un rapport n° 662 intitulé : « La réforme de la carte judiciaire : une occasion manquée ».

Dans sa partie IV, paragraphe C, est évoquée : « La réforme jusqu’à présent écartée : celle des cours d’appel ».

Les rapporteurs « jugent pertinents qu’une réflexion soit engagée sur cette réforme jusqu’à présent écartée ». « Ils observent d’ailleurs que cette réflexion paraît d’autant plus fondée qu’avec la mise en place de pôles interrégionaux entre les cours d’appel (juridictions interrégionales spécialisées – JIRS, pôles Chorus, budgets opérationnels de programme interrégionaux – BOP interrégionaux) s’opère une modification en profondeur des relations entre les différentes cours, qui perdent en autonomie ou tombent sous la dépendance de certaines d’entre elles. Les représentants de la conférence nationale des procureurs généraux ont dénoncé à cet égard une « réforme rampante des cours d’appel ». » (page 114 du rapport).

Divers Ordres des Avocats, et notamment ceux d’Alsace, ont déjà eu l’occasion de dénoncer le système pernicieux actuel qui transfére progressivement certaines compétences au profit de certaines Cours d’Appel.

Ainsi, dans le Grand Est (ressort des Cours d’Appel de Dijon, Besançon, Colmar, Metz, Nancy), c’est toujours Nancy qui a bénéficié des compétences qui ont été concentrées dans le ressort d’une Cour d’Appel :

– Direction de la protection judiciaire de la jeunesse du Grand Est (DPJJ) ;

– Juridiction interrégionale spécialisée dans la lutte contre la criminalité et la délinquance organisées ;

– Juridiction interrégionale spécialisée en matière d’infractions économiques et financières ;

– Pôle de compétences en matière de pratique restrictive de concurrence et notamment l’article L.442-6 du Code de Commerce (rupture brutale des relations commerciales établies, etc…);

– Pôle de compétences en matière de droit de la propriété intellectuelle avec exception pour le ressort de la Cour d’Appel de Colmar suite à un décret modificatif n° 2010-1665 du 28 décembre 2010 alors que la Cour d’Appel de Nancy conserve sa compétence s’agissant des autres recours ;

– Décret n° 2009-1455 du 27 novembre 2009 relatif à la spécialisation des juridictions en matière de contestations concernant les obligations de publicité et de mise en concurrence des contrats de droit privé relevant de la commande publique ;

– Budget opération de programme des unités opérationnelles des Cours d’Appel (BOP) qui constituent une plateforme interrégionale gérant l’aide juridictionnelle, le développement à l’accès et au droit, l’aide aux victimes, la médiation familiale et les espaces de rencontres ;

-Etc…

Le 26 juillet 2012 la plateforme interrégionale administrative a été également fixée à Nancy.

Ainsi, insidieusement, sans aucune concertation, se poursuit la réforme de la carte judiciaire en créant des « super Cours d’Appel ».

Ce phénomène est pour le moins dangereux pour les Cours d’Appel de Dijon, Besançon, Colmar ou Metz qui risquent de devenir de simples succursales de la Cour d’Appel de Nancy.

Le rapport est consultable à l’adresse : http://www.senat.fr/notice-rapport/2011/r11-662-notice.html

La nouvelle circulaire de politique pénale du Ministre de la Justice

La ministre de la justice, garde des sceaux a présenté en conseil des ministres du 19 septembre 2012 la circulaire pénale définissant les axes de la nouvelle politique pénale du gouvernement.

La fin des instructions individuelles :

La garde des sceaux conduira la politique pénale gouvernementale en adressant aux procureurs généraux et procureurs de la République des instructions à caractère impersonnel et général, portant notamment sur des domaines de poursuites particuliers ou des situations qui le justifient localement.

Les principes directeurs de la nouvelle politique pénale :

La circulaire de politique pénale fonde la nouvelle politique pénale du gouvernement sur sept principes directeurs qui doivent être pris en compte à toutes les étapes du procès pénal :

– individualisation des décisions : chaque décision doit – pour être efficace – tenir compte de la gravité des faits commis, de leur circonstances et des éléments concernant la situation de l’auteur de ces faits (travail, logement, famille, addictions…) afin de s’assurer non seulement du caractère punitif de la sanction, mais également de son impact pour prévenir la récidive ; afin de favoriser l’adaptation la plus pertinente des décisions pénales, les instructions enjoignant les parquets à faire systématiquement appel de la non application d’une peine plancher sont abrogées ;

– intervention en temps utile : il est demandé de prendre le temps nécessaire à l’individualisation, et de veiller rigoureusement à traiter dans les meilleurs délais les dossiers qui sont actuellement en attente d’audiencement ;

– attention portée aux victimes d’infractions, qui doit se concrétiser par un accueil et un accompagnement de qualité des victimes dans tous les tribunaux de France : des bureaux d’aide aux victimes, 50 ont été créés en 4 ans, seront installés dans la quasi-

totalité des tribunaux de grande instance d’ici un an.

– respect des droits de la défense : les conseils doivent bénéficier des conditions nécessaires pour exercer leur mission ;

– direction effective des officiers de police judiciaire, les procureurs de la République sont invités à réunir les OPJ de leur ressort pour leur exposer les orientations de politique pénale ; les OPJ seront tenus informés des suites judiciaires données à leurs investigations afin d’améliorer la performance de celles-ci ;

– recours à l’incarcération lorsque toute autre sanction est inadéquate : conformément aux termes de la loi du 24 novembre 2009, il est rappelé que la recherche des modalités de sanction les plus adaptées aux faits commis, à leurs circonstances et à l’objectif de prévention de la récidive constitue une obligation légale et une priorité de politique pénale ;

– spécialisation de la justice des mineurs, qui vise à assurer le recours au juge naturel des mineurs et à garantir la continuité de leur prise en charge.

La lutte contre la récidive et la prévention de la récidive :

La politique pénale se fonde sur les constats suivants :

– le taux de surpopulation carcérale demeure extrêmement élevé, entraînant des conditions de détention indignes et des conditions de travail difficiles pour les personnels : 11 établissements pénitentiaires présentent un taux de surpopulation

carcérale supérieur à 200% et 31 situés entre 150 et 200%

– seules 20% des personnes incarcérées bénéficient d’un aménagement de peine destinées à préparer leur réinsertion.

– 40% des détenus ont été condamnés à des peines fermes de moins de 6 mois et 45% des détenus sont à moins de 6 mois de leur fin de peine.

A partir de ces constats, la chancellerie entend réorienter la politique pénale vers plus d’efficacité, notamment en mettant l’accent sur les aménagements de peines.